Œufs durs vandaloo

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Entrée

C’est à Goa sur la côte sud-ouest de l’Inde, colonie portugaise de 1510 à 1961, qu’est née la préparation culinaire vandaloo ou vindaloo d’une manière portugaise de conserver puis cuire le porc dans du « vinho d’alhos » (vin d’ail). En effet, les portugais amenèrent cette manière de faire dans leurs bagages au XVIème siècle et la population locale se l’appropria en la déclinant à sa sauce épicée ! Les Portugais ont de leur côté conservé leur manière de faire qui est toujours pratiquée, notamment à Madère, sous le nom de Carne de vinha d’alhos, un plat traditionnel pour le déjeuner du jour de Noël.

Les Indiens de leur côté apprécièrent tellement cette préparation vandaloo vinaigrée, épicée et pimentée qu’elle est devenue un grand classique de la cuisine indienne non seulement pour le porc mais aussi pour le poulet, l’agneau, le poisson et même les œufs durs !

Ingrédients (pour 4 personnes) :
- 4 ou 6 œufs durs,
- 1 oignon saucier,
- 1 cuillerée à soupe de beurre clarifié (ou de margarine),
- 2 gousses d’ail,
- ¼ cuillerée à café de piment des oiseaux en poudre (ou de piment de Cayenne voire de piment d’Espelette si vous préférez moins hot !),
- ½ cuillerée à soupe de gingembre moulu,
- ½ cuillerée à café de graines de cumin,
- ¼ cuillerée à café de cannelle moulue,
- ½ cuillerée à café de sel fin.
- 10 cl de vinaigre de vin,
- ½ cuillerée à café de garam masala,
- ½ cuillerée à soupe de sucre cristallisé,
- 8 galettes de pain « roti » (pain indien complet sans levure grillé), à défaut des tranches de pain de campagne grillé …
- en option fortement recommandée : 8 feuilles de laitue.

Temps nécessaires :
- préparation : 30 minutes,
- cuisson : 15 minutes.

Faire bouillir de l’eau dans une grande casserole puis y faire cuire les œufs durs 10 minutes à la reprise de l’ébullition (ne pas faire comme moi même si vous êtes pressés : déposer les œufs dans l’eau à l’aide d’une écumoire et non pas les déposer dans l’eau au risque de les casser en vous brûlant les doigts…).

Une fois cuit, les mettre à rafraîchir dans l’eau froide.

Pendant ce temps, éplucher et hacher les oignons puis les faire frire dans la margarine. Éplucher l’ail et le dégermer

Une fois bien dorés, transférer les oignons dans un hache-herbe ou un bol puis ajouter l’ail pressé au presse-ail, le piment, le gingembre, les graines de cumin, la cannelle, le sel et une cuillerée à soupe de vinaigre et mixer le tout ou réduire en purée avec un pilon dans le mortier.

Dans une casserole, faire dissoudre le sucre dans le vinaigre additionné de 10 cl d’eau, faire réduire de moitié puis ajouter le garam masala et la pâte, délayer le tout faire prendre un bouillon et réserver hors du feu.

Pendant ce temps, écaler les œufs, les couper en 2 dans leur longueur et les dresser dans le plat ou les assiettes de service, éventuellement sur une ou deux feuilles de laitue…

Napper les œufs de la sauce et servir avec des galettes de « rôti ».

And for English speakers: the original recipe in english!

Egg vandaloo
Hard-boiled eggs in a spicy but tasty gravy.

Ingredients
Hard boiled eggs 4-5 nos.
Onions 2 nos.
Dry red chilies 4 nos.
Garlic 5 flakes
Ginger 1 piece
Cummin seeds ½ tsp.
Cinnamon 1 piece
Garam masala 1 tsp.
Vinegar ¾ cup
Sugar 1 tbsp.
Ghee 2½ tbsp.
Salt to taste

Method
Grind the red chilies, garlic, ginger and cummin seeds with a little vinegar and salt to taste.

Chop the onions and fry in ghee, then add the ground paste and cinnamon to it.

Then add sugar, vinegar and garam masala.

Shell the eggs, cut into halves, lengthwise and add to the curry.

Cook till the gravy thickens and serve with rice or rotis.

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Filet de bœuf en feuilles de brick

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Plat

Une solution de cuisson « à l’étuvée » plus délicate qu’en « croûte » et qui convient très bien à cette pièce de grande qualité qu’est le filet de bœuf !

Ingrédients (pour 6 personnes) :
- 1,2 kg de filet de bœuf,
- 3 cuillerées à soupe d’huile,
- 50 g de beurre doux,
- 12 feuilles de brick,
- 3 brins de sauge,
- 6 gousses d’ail,
- 40 g de trompettes de la mort séchées,
- sel fin et poivre du moulin.

Temps nécessaires :
- préparation : 20 minutes,
- cuisson : 20 à 25 minutes,
- repos : 5 minutes.

Préchauffer le four à 210°C (thermostat 7).

Faire fondre 50 g de beurre à feu très très doux pour le clarifier.

Faire chauffer l’huile dans une cocotte ou une sauteuse. Quand elle est bien chaude, y saisir le filet de bœuf en le retournant pour qu’il dore bien de tous cotés puis le laissez dégraisser sur du papier absorbant. Retirer ficelles et barde, saler et poivrer.

Disposer la barde sur le fond d’un plat à four.

Effeuiller la sauge. Réserver quelques feuilles pour la décoration et poser les autres sur le filet de bœuf.

Étaler une feuille de brick sur le plan de travail. La badigeonner de beurre clarifié avec un pinceau de cuisine, lui superposer une autre feuille de brick, badigeonner de même de beurre clarifié puis enrouler le filet de bœuf dans ces 2 feuilles de brick et recommencer de même cinq fois avec les 10 autres feuilles.

Une fois bien emballé, poser le rôti dans un plat à four.

Écraser légèrement les gousses d’ail et les mettre, en chemise, dans le plat autour du rôti. Répartir de même les champignons.

Enfourner pour 20 à 25 minutes.

Sortir le filet du four, couvrir de papier aluminium et laisser reposer 5 minutes.

Le couper en tranches fines et servir décoré des feuilles de sauge avec les champignons en accompagnement.

On peut aussi accompagner d’un rösti de pommes de terres aux courgettes

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Rösti de pommes de terre aux courgettes

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Accompagnement

Un très bon accompagnement pour une viande rouge rôtie, comme par exemple un filet de boeuf en feuilles de brick, ou encore avec une salade verte.

Ingrédients (pour 4 personnes) :
- 400 g de courgettes,
- 400 g de pommes de terre,
- 1 oignon jaune,
- 1 cuillerée à soupe bombée de persil haché,
- 2 œufs,
- 50 g de chapelure,
- 4 cuillerées à soupe d’huile d’olive,
- 1 cuillerée à soupe rase de sel fin et poivre du moulin.

Temps nécessaires :
- préparation : 20 minutes,
- attente : environ 1 heure,
- cuisson : environ 20 minutes par fournée.

Éplucher les pommes de terre, les passer à l’eau et les essuyer. Laver les courgettes puis éliminer leurs extrémités. Éplucher l’oignon et le couper en 4. Râper grossièrement le tout, mélanger, mettre dans une grande passoire, saupoudrer du sel fin et laisser égoutter pendant environ 1 heure.

Dans un saladier, battre les œufs puis ajouter l’oignon, les pommes de terre et les courgettes râpées et mélanger, la chapelure, le persil haché et quelques tours de moulin à poivre, et bien mélanger ; goûter et ajuster l’assaisonnement si nécessaire.

Faire chauffer 1 cuillerée à soupe d’huile d’olive dans une poêle et faire revenir le mélange en remuant pendant environ 5 à 10 minutes pour bien lui faire évaporer son eau puis retirer de la poêle et façonner 8 galettes plates (on peut s’aider de cercles de cuisine).

Faire chauffer les trois autres cuillerées d’huile d’olive dans la poêle puis y faire frire les galettes à feu moyen pendant environ 10 minutes de chaque côté.

Les retirer lorsqu’elles sont bien dorées et les égoutter sur un papier absorbant avant de servir.

Réserver au chaud (dans un four à 120-150°C, thermostat 4-5) si vous devez faire cuire en plusieurs fournées.

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Cake au miel généreux de Francis P. !

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Le cake au miel, le lekach de Rosh Hashanna, c’est déjà un gâteau généreux avec 250 g de miel (voir recette plus bas…).

Mais quand c’est Francis P. qui le prépare, avec la générosité qu’on lui connaît, et qu’il double la quantité de miel, voilà ce que ça donne ! :D

Et y’a même du rab dans le four !

Et voici la recette du lekach de Rosh Hashanna issue du « Pétrin » :

200g de farine T55 tamisée
45g de sucre
1 cc de bicarbonate de soude
gingembre, cannelle, 5 épices: au goût
60g d’huile végétale neutre
250g de miel (acacia, oranger etc..)
3 oeufs
60g de jus de pomme

Préchauffer le four th. 6 (180°C). Huiler un moule à cake standard.

Dans un saladier moyen, mélanger la farine, le sucre, le bicarbonate de soude et les épices.

Note: pour respecter le goût des enfants, je n’ai mis qu’une pincée de chacune des épices citées mais vous avez le choix soit de les omettre soit d’en varier la quantité voire d’en choisir d’autres (anis, cardamome, girofle etc..)

Creuser un puits et verser l’huile, les œufs légèrement battus à la fourchette, le miel et le jus de pomme. Mélanger au fouet à main ou à la cuillère en bois juste assez pour obtenir une pâte lisse et sans grumeaux.

Verser la pâte dans le moule, enfourner et cuire pendant 25 min puis tourner le moule de 180°C et prolonger la cuisson de 15 à 20 min ou le temps que le gâteau ait pris une belle couleur caramel et qu’un pic enfoncé au centre ressorte propre.

Note: si le gâteau se colore trop rapidement, placer une feuille de papier aluminium au-dessus avant de tourner le moule

Laisser complètement refroidir sur une grille.

Pour mieux apprécier le lekach, il est conseillé de le préparer au moins 1 jour à l’avance (2 ou 3 jours, c’est encore mieux!) et de le laisser « maturer » bien emballé dans du papier aluminium pour plus de saveur…

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Foie gras cru cuit au sel

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Entrée

Une recette assez classique proposée par Julie Andrieu pour le repas de Noël 2009 de « C à vous » sur Fr5.

Et que j’ai testée évidemment, adorant Julie et aussi le foie gras !

Bon, moi j’aime bien le foie gras mi-cuit dans la graisse de canard ou d’oie mais c’est vrai que cette manière de faire est bonne également et plus simple à faire pour ceux qui n’ont pas de graisse (de canard ou d’oie…) ou pas assez de temps à passer à la cuisine…

Ingrédients (pour 4 personnes) :
- 1 foie gras de canard cru de 500 g environ (le foie pas le canard :D ),
- 500 g de gros sel,
- 1 cuillerée à soupe de grains de poivre noir (ou mélange de poivres épicé ou non)*,
- 80 g de sucre semoule,
- 1 compresse de gaze (20 x 20 cm),
- 8 tranches de pain de campagne grillées,
- 1 cuillerée à soupe de grains de poivre cubèbe ou 1 cuillerée à café de piment d’Espelette moulu,
- et en option : gelée au madère.

Temps nécessaires :
- préparation : 5 minutes à 2 heures 30 minutes (selon que le foie est dénervé ou non),
- macération et repos : 36 heures à 48 heures,
- finition : 30 minutes.

Si le foie n’est pas déveiné (déveiné et non dénervé car ce sont des veines qui se trouvent dans le foie et non des nerfs !), le faire tremper 2 heures dans de l’eau froide, l’égoutter, le sécher puis le laisser 30 minutes dans le réfrigérateur pour le raffermir en le mettant à une température de l’ordre de 4 à 5°C.

Séparer délicatement les deux lobes et localiser vers leur haut un vaisseau ramifié ; dégager ce vaisseau en incisant légèrement avec un petit couteau pointu puis le séparer délicatement du lobe avec les doigts : on découvre un vaisseau qui se ramifie ; le prendre entre le pouce et l’index et tirer lentement et délicatement dessus en maintenant le foie avec la paume de l’autre main et en s’aidant au besoin pour l’extirper de la pointe du couteau. Il s’agit d’extirper la partie la plus dure des veines : inutile de s’acharner en essayant d’extraire la totalité des veinules : voir ce qu’il faut éviter de faire ! …sauf si vous êtes un inconditionnel de la bouillie de foie gras !

Concasser le poivre noir ou le mélange de poivres dans un hache-herbes (ou avec un rouleau à pâtisserie).

Bien mêler sel, sucre, poivre concassé et éventuellement épice moulue.

Emmailloter le foie dans la gaze.

Dans le fond d’une terrine à la dimension du foie, verser une couche d’un bon centimètre du sel aromatisé, déposer le foie puis couvrir avec le reste du sel aromatisé.

Couvrir et placer au réfrigérateur pour environ 12 heures.

Déballer le foie de la gaze et ôter toute trace de sel au pinceau. Laver et sécher la terrine puis tasser le foie dans celle-ci et laisser reposer 24 à 36 h au frais, à couvert.

Une demi-heure avant de servir, passer le foie dans le compartiment à glace du réfrigérateur pendant 15 minutes (pour le raffermir) puis le couper en fines tranches avec un grand couteau bien aiguisé et le dresser sur le plat de service.

Servir le foie gras avec des toasts de pain de campagne bien chauds et, à part, le piment d’Espelette moulu ou le poivre cubèbe concassé au rouleau à pâtisserie, éventuellement de la bonne gelée au madère émietté grossièrement avec une fourchette.

* On peut remplacer le poivre noir par du « poivre du Sichuan » ou un mélange de baies roses et de grains de poivres noir et blanc et aussi ajouter une demie à une cuillerée à café d’une épice réduite en poudre : muscade, cannelle, anis étoilé, cardamome, …

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Chocolat earl grey

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Ah qu’il est bon ce chocolat Earl Grey de Jeff de Bruges en tablettes que m’offre notre copine Nathalie L. !

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Légumes : le crosne du Japon

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Oh, les belles grosses chenilles à la peau nacrée !

Mais non mon gros bêta : ce sont des crosnes du Japon !

Nom botanique : Stachys affinis Bunge
Le crosne (prononcer craune et non crossne !) du Japon est une espèce du genre Stachys de la famille des Lamiacées, la seule plante potagère de cette famille de végétaux pourtant très présente dans les cuisines avec de nombreuses plantes aromatiques et mellifères : lavande, menthe, mélisse, romarin, sarriette, sauge, serpolet, thym !

Noms communs
En France, on l’appelle crosne du Japon ou parfois tout simplement crosne, nom donné comme bien souvent non seulement à la plante mais aussi à la partie consommée !

Autres noms communs :

    en France :

artichaut chinois, artichaut japonais, épiaire à chapelets (car ses rhizomes rappellent ceux de l’avoine à chapelets Avena precatoria Thullier).

    … et à l’étranger :

en allemand : Chinesische Artischocke, Japanese Artischocke, Chinesische Artischocken, Japanische Kartoffel, Japanziest, Knollenkartoffel, Knollenziest, Ziestknollen ; en anglais : artichoke betony, chinese artichoke, japonese artichoke, knotroot ; en chinois :甘露子 (gān lù zǐ : petit de la rosée douce) ; 草石蚕 (cǎo shí cán : plante pierre ver à soie) ; en coréen : 초석잠. ; en danois: Japankartofler, Kinaskok, Kinesiske jordskokker, Stachysknolde ; en espagnol: alcachofa betónica, alcachofa china, crosne del Japón, estaquídea del Japón ; en grec : Κινέζικα αγκινάρα ; aγγινάρα της Iαπωνία ; en hollandais : Crosne wortelknolletjes, Japanse andoorn ; en italien : tuberina ; en japonais : ちょろぎ ou 草石蚕 (choro-gi), mora-imo (de mora, cor ou cornemuse et imo tubercule) ; en malais : tung tung chow, en polonais : czyściec bulwiasty ; en portugais : crosnes do Japão ; en russe : чистец зибольд (chistec zibol’d) ; японский артишок (iapnskii artishok) ; kитайский артишок (kitaiskii artishok) ; en suédois : Japansk jordarttskocha ; en thaï : thua duang.

Aspect et dimensions
C’est une plante vivace et rustique, cultivée comme annuelle sous climat tempéré où elle fleurit rarement et ne forme donc pas de graines mais qui, sous ce climat, reste vivace par son tubercule, ou plutôt son rhizome (partie sous-terraine de la tige) qui tolère très bien l’hiver si la terre ne gèle pas en profondeur…

La tige simple ou rameuse, à section carrée comme la plupart des Lamiacées, dressée ou couchée, atteint 30 à 45 cm de haut, et chaque touffe atteint 40 cm de diamètre. Les tiges portent des feuilles vert tendre puis terne, plus petites en haut de la tige qu’en bas, opposées et alternées, avec un pétiole assez long, et sont dentées et crénelées à pointes effilées ; elles sont rugueuses, couvertes de poils rudes et épais, et rappellent les feuilles de menthe.

La floraison, blanche ou rose, se produit en été en Asie mais très très rarement en Europe et la plante ne fructifie donc qu’exceptionnellement sous nos climats. Dans sa pourtant longue vie, Désiré Bois, à l’origine de l’acclimatation de cette plante dans les pays occidentaux avec son ami Auguste Paillieux, ne l’observa qu’une fois, en 1891, dans le jardin du baron Le Tourneur à Proche-Gautier dans la Manche.

Les fleurs, labiées et sessiles, forment des inflorescences serrées en forme de faux verticilles. Le calice en forme de cloche ou d’entonnoir, à dents aigües est formé de 5 sépales.

La corolle, longue de 10 à 14 mm, à tube saillant, est de couleur rose pourpre et porte un anneau de poils à l’intérieur ; à sa partie supérieure on distingue 4 étamines et 2 carpelles à 4 loges. Le fruit, sec et indéhiscent, est composé de 4 akènes.

Comme pour la pomme de terre, la partie consommée est une réserve nutritive vivace de la plante et qui est constituée de chapelets de renflements souterrains de la tige ; ce sont des petits rhizomes de couleur blanc nacré, parfois jaunâtre, très contournés, de 1 à 3-5 cm de long. Il existe une variété de crosne avec des rhizomes boursouflés à la manière d’une chenille annelée et une autre dont les rhizomes sont plutôt spiralés à la manière de petits coquillages coniques pointus…

Dans un terrain léger, sableux et légèrement humide, grâce à ses rhizomes rustiques, le crosne du Japon se propage rapidement d’année en année jusqu’à former un couvre-sol très solide qui stabilise le sol (mais envahit le terrain !)…

Ainsi, en 1882, Auguste Pailleux et Désiré Bois réussissent à récupérer 5 ou 6 tubercules d‘un envoi fait de Chine. Ils les mettent en couche, laisse la touffe en place l’hiver 1883 et, pendant l’hiver 1884-1885, ils récoltent environ 200 à 300 tubercules pour chaque tubercule initial, soit environ 5 kg… Et, dès l’hiver 1886-1887, la récolte de rhizomes est d’environ 3.000 kg ! Quand on sait qu’à l’époque, il y avait environ 600 tubercules au kg, cela représente alors 1.800.000 crosnes !

Particularités
Les crosnes ont une saveur douce et une texture fine qui rappellent celles du cœur d’artichaut ou des châtaignes d’eau (certains disent du rutabaga… moi je ne trouve pas… mais il paraît que ça dépend du mode de cuisson).

Contrairement à la plupart des autres tubercules, notamment les pommes de terre, la substance nutritive du rhizome n’est pas de l’amidon mais des galactanes (monomères de galactose) et de la stachyose tétrasaccharide, un sucre composé de deux molécules de galactose, d’une de fructose et d’une de glucose.

Et, si notre digestion sait transformer l’amidon en glucose grâce à différentes enzymes que nous fabriquons, ce n’est pas le cas de la stachyose tétrasaccharide… ; et ce sont donc les bactéries de notre flore intestinale qui se charge d’assimiler ce sucre… mais comme bien souvent, ces charmantes bestioles qui nous aident à digérer ce que l’on ne sait pas assimiler, transforment ces sucres en produisant des gaz…

Ce qui fait que la digestion du crosne du Japon est source de flatulences… comme c’est le cas pour le salsifi, le soja et les graines de légumineuses (haricots, pois chiches, lentilles) qui contiennent la même substance, …

Propriétés nutritives
Le crosne est un légume diététique avec, pour 100 g, une valeur calorique de 75 kcal, 2,6 g de protéines (glutamine, tyrosine), 16 g de glucides (essentiellement galactanes mais aussi stachyose tétrasaccharide dont on a déjà parlé plus haut et très peu d’amidon), très peu de lipides (0,04 à 0,18 g), peu de cellulose (environ 0,7 g).

Il ne contient pratiquement pas de vitamines mais est par contre riche en sels minéraux (environ 1 à 1,4 g pour 100 g : potassium, phosphore, calcium) et aussi en bétaïne (composés d’ammonium).

Frais, le crosne est très riche en eau (80%). Son goût d’artichaut est dû à la présence de cynarine, substance qui stimule la formation et l’élimination de la bile et apaise les troubles du foie et de la vésicule biliaire. Les crosnes ont également une action légèrement hypotensive.

Origine et histoire
Je dispose de tellement d’informations issues d’un petit fascicule que m’ont aimablement prêté Yolande et Gilbert B., des amis « anciens crosnois » dont les informations sont plus sûres que certaines allégations pour le moins douteuses courant sur le ouaibe que j’en ai fait un article à part : Il était une fois un crosne arrivé en Occident en 1882….

Ce petit fascicule très documenté de 60 pages de Jean Mercier et Maurice Pérennes, 2 Crosnois, le premier travaillant au laboratoire de Phanérogamie du Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris, le second, diplômé de l’École d’Horticulture et d’Arboriculture de la ville de Paris, dont les informations s’appuient sur de nombreux ouvrages anciens et des archives du Muséum National d’Histoire Naturelle, a été concocté par eux, en 1982, pour le centenaire de l’arrivée de Stachys affinis Bunge à Crosne !

Culture
Le crosne se cultive facilement sous climat tempéré dans un sol léger et à dominante sableuse pour faciliter l’arrachage, frais mais pas trop humide, avec une exposition ensoleillée. Très peu sensible aux maladies surtout suite aux progrès phytosanitaires des années 1980, un seul tubercule oublié peut de nouveau donner naissance à de nombreux nouveaux pieds l’année suivante !

Sa multiplication peut se faire par semis, par division de touffes, par marcottage et par bouturage. Le plus souvent, on le cultive par plantation de rhizomes qui sont au nombre d’environ 500 par kg ; il en faut environ 5 à 6 kg pour planter un are, en espérant en récolter 100 kg, soit un kg au m2 ! On choisit des plants régénérés du commerce, certifiés indemnes de viroses, ou alors, en janvier, on prélève des rhizomes que l’on dispose stratifiés dans du sable en caissettes en bois que l’on stocke à température de 5 à 10°C à l’abri de la lumière et de l’humidité en attendant de les replanter. On peut aussi conserver quelques pieds de crosnes en terre pour la plantation de l’année et prélever les bulbes en mars pour les séparer juste avant de les replanter.

Avant la plantation, fertiliser le sol avec un engrais complet 10.10.20 à raison de 8 à 10 kg à l’are ; la plantation des rhizomes se fait en mars ou avril : on met 3 à 4 tubercules par poquet dans une profondeur de 10 à 15 centimètres de profondeur, espacés de 35 à 40 centimètres en tous sens.

Bien biner et sarcler entre les rangées de plants pendant la végétation et arroser modérément en été pendant les périodes de sécheresse pour maintenir le sol frais, car le crosne craint trop de sécheresse. On peut installer un paillage pour éviter la pousse des mauvaises herbes et maintenir le sol frais comme il faut.

Début septembre, former une butte de terre aux pieds des tiges. En cas de limaces mettre des appâts pour les éliminer. Le cas échéant, l’araignée, le puceron et la tardeuse du crosne sont à combattre par des insecticides.

La formation des rhizomes a lieu en arrière-saison après l’arrêt de croissance des tiges et la récolte peut commencer en novembre, dès que les feuilles et les tiges se dessèchent. La récolte est effectuée comme pour les pommes de terre, avec une fourche-bêche, en faisant levier avec le manche le long d’un rang pour soulever délicatement la terre puis en prélevant les tubercules : ne les prélever qu’au fur et à mesure des besoins car ils se flétrissent rapidement à l’air libre. Laisser les autres en terre en les préservant tout au plus avec un paillage ou quelques feuilles, car ils supportent une gelée superficielle sans problèmes. Les crosnes prélevés qui ne sont pas consommés immédiatement sont conservés dans le sable. Et on peut ainsi les récolter jusqu’en mars.

Période de consommation
Les rhizomes de crosne sont récoltés (et commercialisés) de novembre-décembre à mars-avril.

Le choisir
Choisir des crosnes de forme bombée, fermes et doux au toucher, de couleur claire blanc nacré (très légèrement jaunâtre à la rigueur) et avec des extrémités non fripées. Si on essaie de plier un tubercule, il ne doit pas plier mais résister pour finir par craquer brutalement, le crosne n’est alors pas résilient mais parfait pour être consommé !

Ils sont désormais vendus le plus souvent pré-lavés, ce qui facilite leur préparation.

Conservation
Il faut cuisiner les crosnes le jour même ou le lendemain de leur achat car ils se dessèchent, se flétrissent, se ramollissent et virent au beige-brunâtre en deux ou trois jours à l’air libre.

Si vous le cultivez vous-même, la récolte de la juste quantité nécessaire doit être faite le jour de son utilisation d’autant qu’ils sont d’autant plus exquis qu’ils sont frais.

Il est possible de le conserver enfoui dans du sable, dans un endroit frais et relativement sec (cave) comme cela est pratiqué par les horticulteurs…

Il est possible aussi de le conserver quelques heures dans de l’eau vinaigrée ou citronnée après l’avoir nettoyé. Il paraît qu’on peut aussi le congeler lavé puis séché … mais je pense qu’il vaut mieux le consommer frais…

Le préparer
Si les crosnes sont sableux ou terreux, les passer rapidement sous l’eau en les brossant avec un pinceau.

Sauf si vous hébergez chez vous une troupe de schtroumpfs ou de lilliputiens munis de tous petits économes, inutile d’envisager d’éplucher les crosnes, car ils sont si petits et si biscornus que tout va finir en épluchures : autant les mettre directement dans la poubelle à végétaux ou sur le tas de compost après les avoir achetés, vous gagnerez du temps !

En général, pour les nettoyer et éliminer les petits bouts de peau flétries, les gens recommandent de les mettre dans un linge propre, sec et rugueux avec du gros sel et de les frictionner en se débrouillant comme on peut en secouant, en roulant et en frottant ….

J’ai essayé cette technique mais je préfère nettement faire comme çà : je mets 250 à 300 g de crosne avec 3 cuillerées à soupe de gros sel dans un bocal d’un litre fermant hermétiquement et, sur fond de samba, je secoue énergiquement le bocal comme un shaker comme si je préparais un cocktail ou essayais de décoller la pulpe du fond de la bouteille de cette boisson à basse d’oranges dont j’ai oublié le nom… De cette manière, on décolle les impuretés et les peaux flétries de la surface des bestioles…

Je préfère cette technique, plus efficace et plus rapide, et qui évite de semer du gros sel plein la cuisine (Chantal aime pas trop… Bob le Lhassa-apso Shi-tsu non plus…). Bon, évidemment, si vous voulez salez votre trottoir pour éviter le gel (c’est généralement de saison), vous pouvez-allez faire le guignol devant chez vous avec votre torchon et votre lecteur MP3 jouant la lambada…

D’autres préconisent de nettoyer soigneusement avec un engin genre brosse à dents (propre et sans pâte dentifrice de préférence…) ; là, à mon avis ça tient de la pub pour la nouvelle lessive de Coluche, vous savez, celle qui lave aussi blanc qu’avant mais en faisant des nœuds : 5 minutes pour acheter les crosnes, le week-end pour les brosser et 10 minutes pour les cuire…

Bon, après, quelle que soit la méthode de nettoyage, on met les crosnes dans une passoire (à gros trous de préférence) puis on les rince sous un filet d’eau courante pour éliminer le gros sel et les impuretés décollées des bêtes par l’opération « secouez-moi »… On sèche dans un torchon, on élimine les extrémités poilues ou flétries si on ne l’a pas déjà fait et, si on ne les cuisine pas tout de suite, on les met à tremper dans un petit peu d’eau citronnée ou vinaigrée dans un récipient opaque et couvert pour ne pas qu’ils jaunissent, jusqu’au moment de les égoutter et les sécher avant de les cuisiner…

Utilisation en cuisine
Seul le rhizome est utilisé, en légume d’accompagnement, dans des salades ou comme condiment.

Les crosnes accompagnent parfaitement les viandes rôties ou en sauces et notamment les volailles blanches, les poissons blancs et délicats (sole, sandre, truite, plie, barbue, …) et ils se marient bien avec la pomme de terre, le céleri, le germe de soja, la tomate, le jambon cru, les lardons, la crème fraîche, le persil, la ciboulette, l’oignon, … Le chef Guy Savoy en fait un accompagnement privilégié des oursins.

On peut les cuire à la vapeur ou dans de l’eau frémissante salée (additionnée d’un peu de jus de citron ou de vinaigre pour qu’ils restent blancs) pendant 10 à 12 minutes. On les accommodent alors en salade, nature avec une vinaigrette ou accompagnés d’œufs durs, de jambon cru, de persil ou de ciboulette, en purée ou salés, poivrés et nappés de crème fraîche et saupoudrés de persil ciselé ou encore juste réchauffés dans une poêle après les avoir ajoutés à des petits lardons préalablement bien dorés et en saupoudrant de persil ciselé à la fin.

On peut aussi les blanchir 2 minutes dans de l’eau frémissante salée et citronnée, les égoutter et les sécher puis finir de les cuire dans un petit peu de jus de viande ou les faire sauter à couvert à la poêle dans un peu de beurre ou d’huile d’olive, en les faisant colorer à peine, ou au wok avec des prunes marinées, du bœuf, des champignons et des cubes de to-fu ou en faisant des beignets ou en les gratinant avec une béchamel.

On peut aussi en faire des pickles ou condiments, confits au vinaigre, comme des petits cornichons, en utilisant les mêmes aromates (estragon, oignons grelots, poivre, piment). C’est même d’ailleurs, le principal usage qu’en font les japonais, macérés dans du vinaigre de prune…

Enfin, les crosnes sont un parfait substitut aux châtaignes d’eau dans les plats asiatiques.

Quelques recettes trouvées sur le ouaibe…
- Crosnes au bouillon,
- Crosnes sautés au yaourt,
- Poêlée de crosnes à la crème,
- Ris de veau et crosnes, inspiration Nantua,
- Panaché du sud aux crosnes,
- Poularde cocotte aux girolles, aux crosnes du Japon et aux ocas du Pérou.

Et aussi les crosnes à la manière de Charlotte Pailleux, arrière-arrière petite fille d’Auguste Paillieux qui perpétue la tradition familiale de cusiner le crosne pour les fêtes de fin d’année et a bien voulu me confier sa recette préférée !

Non, non, non, le Crosne n’est pas mort !

Car des chercheurs de l’ENS de Lyon s’intéressent à lui : à quand le crosne sur Mars dans les réserves alimentaires des futurs cosmonautes qui iront là-bas ?

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Histoire de crosnes…

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Les informations ci-dessous sont issues d’un petit fascicule rare que m’ont aimablement prêté Yolande et Gilbert B., des amis « anciens Crosnois » ; ce petit fascicule très documenté de 60 pages de Jean Mercier et Maurice Pérennes, 2 Crosnois, le premier travaillant au laboratoire de Phanérogamie du Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris, le second, diplômé de l’École d’Horticulture et d’Arboriculture de la ville de Paris, établi en s’appuyant sur de nombreux ouvrages anciens et les archives du Muséum National d’Histoire Naturelle, a été concocté en 1982 pour célébrer le centenaire de l’arrivée du crosne du Japon à Crosne…

Et ces informations sur l’histoire du crosne sont si nombreuses que j’en ai fait un article spécifique séparé de sa monographie « Le crosne : sa vie, son oeuvre !« 

Le crosne du Japon est chinois !
En effet, d’après le botaniste, taxonomiste et explorateur russe d’origine allemande Karl Ivanovitch Maksimovich (°11 ou 23 novembre 1827 à Toula-†4 ou 16 février 1891 à Saint-Pétersbourg – apparemment on ne sait pas si son état civil a été enregistré sous calendrier grégorien ou julien ! -), le crosne du Japon a pour origine le nord de la Mongolie et de la Chine : à la fin du XIXème siècle, ce botaniste constate que cette plante existe à l’état endémique dans les environs de Tsetsen-Uul (alors Kantaï) dans la province de Zahvan en Mongolie, de Yuxian (alors Po Hua-shan) dans la province du Hebei à l’ouest de Pékin, de Quingdao (alors Tche-Fou) dans le Shandong au sud-est de Pékin et aussi de Panzhihua (alors Ta Pin-tze), au sud du Sichuan. Au japon, elle ne semble exister alors qu’à l’état cultivé près de Tokyo et aussi à Aomori, au nord de l’île principale de Honshū, et aussi à Dejima, dans la baie de Nagasaki.

Le crosne est de plus un légume cultivé et un aliment traditionnel ancestral de la cuisine chinoise : il est décrit et mentionné comme plante alimentaire dans l’herbier « Chiu Huang Pen Ts’ao » (Flore du salut de la disette) publié en 1406 et qui est un ouvrage de Chu Hsiao (°9 août 1361-†2 septembre 1425), cinquième fils de Hongwu (°1328-†1398), empereur fondateur de la dynastie Ming.

Puis à la suite des chinois, les japonais l’adoptent, il y a bien longtemps, mais sans en faire une grande culture, juste quelques pieds dans leurs jardins, pour l’accommoder à leurs salades !

L’arrivée du crosne dans les pays occidentaux…
Il faut attendre 1882 pour que le légume pointe son né dans les pays occidentaux… Et où ? Je vous le donne en mille ! Mais à Crosne évidemment !

Aujourd’hui petite ville à 17 km au sud-est de Paris, Crosne était alors un village horticole et viticole très ancien, connu depuis des temps reculés sous le nom gallo de Crôna, et où, comme dans les localités voisines de Yerres et Brunoy, de nombreux bourgeois ou artistes parisiens firent construire ou acquirent des résidences de campagne et de week-end, à partir du milieu du XIXème siècle…

L’un d’eux, Nicolas Auguste Paillieux dit Auguste Paillieux (°10 septembre 1812 à Paris-†8 février 1898 à Paris), un industriel parisien qui fît prospérer une fabrique de tulles brodés et de broderies dont il avait la charge, se retira des affaires en 1871 (à 59 ans !) pour s’installer à Crosne, en alternance avec Paris, pour s’y consacrer à sa passion du jardinage…

Il occupe tout d’abord une maison située vers l’actuel 28 de l’avenue Jean-Jaurès, au dessus duquel il dispose de jardins, puis quitte cette maison pour louer une maison, assez grande mais modeste, un petit peu plus haut, au 48 rue de La Fontaine, et qui existe toujours. Il dispose également d’un jardin d’essais situé non loin de là vers le n°12 actuel de la rue des Vignes…

Car retiré des affaires, Auguste veut se rendre utile à la société en entreprenant des cultures expérimentales de plantes peu connues mais pouvant avoir des propriétés alimentaires intéressantes… Pour l’aider dans sa tâche, une fois les premières cultures mise en place, il s’entoure des services d’un jardinier expérimenté, M. Veniat qui, passionné par les recherches de son patron, restera à son service pendant 25 ans…

En 1875, Auguste Paillieux devient membre de la Société Nationale d’Acclimatation, la plus ancienne des sociétés de protection de la nature au monde, fondée en 1854, et qui a survécu depuis contre vents et marées pour devenir la Société Nationale de Protection de la Nature dont le but est aujourd’hui la protection des espèces animales et végétales sauvages et des milieux naturels.

En 1876, il présente à cette société, les résultats des travaux expérimentaux qu’il a entrepris, après son arrivée à Crosne, sur la culture du souchet comestible ; c’est à cette occasion qu’il fait la connaissance de Désiré Georges Jean Marie Bois, dit Désiré Bois (°9 octobre 1856 à Granville dans la Manche-†2 février 1946 à Saint-Mandé dans le Val-de-Marne actuel), un très jeune botaniste passionné d’horticulture, entré tout jeune comme élève jardinier au Muséum National d’Histoire Naturelle à Paris, en mars 1872. Auguste Paillieux considérera dès lors Désiré comme son ami et pratiquement son fils adoptif et celui-ci travaillera avec Auguste durant 22 ans, jusqu’à la mort de ce dernier…

En 1880, Auguste reçoit la médaille de 1ère classe de la Société Nationale d’Acclimatation pour ses travaux sur Glycina hispida Moench, plus connu sous son nom commun de soya ou soja, plante qu’il cultiva et propagea en France, sur laquelle il écrivit une monographie remarquable et pour laquelle il développa un modèle réduit des appareils utilisés en Chine pour fabriquer le to-fu en broyant des grains de soja.

Désiré Bois fait lui aussi son bout de chemin puisqu’en 1877, tout en suivant les cours du Muséum et de l’Association Philotechnique, il fonde une Société d’Instruction Professionnelle avec des camarades pour un enseignement mutuel reposant sur des conférences et une bibliothèque acquise en fond commun… En 1878, il devient chef de la graineterie du Muséum puis, en 1879, est nommé préparateur de la nouvelle chaire de phanérogamie. Il est admis à la Société Botanique de France en 1884. Il professe ensuite à l’école coloniale de 1896 à 1913 puis de 1920 à 1932 comme professeur de culture du Muséum ; il devient également président de la Société Botanique de France de 1920 à 1921 puis, pour un second mandat, de 1931 à 1932 !

Mais revenons en 1876 où les deux hommes sympathisent puis utilisent les jardins d’Auguste à Crosne, avec l’aide du jardinier M. Veniat, pour expérimenter et étudier l’acclimatation de plantes qu’ils achètent à l’étranger. En 1879 est publié le premier livre écrit ensemble par Auguste et Désiré : « Nouveaux légumes d’hiver : expériences d’étiolement pratiquées en chambre obscure sur 100 plantes ». Car, à Crosne, ce sont sur plusieurs centaines d’espèces de plantes que les deux hommes, aidés du jardinier procèdent à leurs expériences de culture et d’acclimatation…

En 1885, ce premier livre sera suivi par un second cosigné de ces deux amoureux de botanique pratique : « Le potager d’un curieux: Histoire, culture et usages de 250 plantes comestibles, peu connues ou inconnues » ; devant son succès ce livre sera réédité en 1892 puis en 1899 … Ces dernières années, il a fait l’objet d’une nouvelle réédition.

Et maintenant, revenons à nos crosnes !
Auguste et Désiré, acquièrent en 1882, par l’intermédiaire de la Société Nationale d’Acclimatation, des rhizomes de Stachys affinis qui arrivent de Pékin en fort mauvais état : seuls 5 ou 6 tubercules, une dizaine de grammes, sont récupérables, le reste, pourri, est à jeter… Mais les doigts verts des trois passionnés d’acclimatation font des merveilles : ils plantent les rhizomes et, l’hiver 1883-1884, les laissent en place…

L’hiver 1884-1885, les 5 à 6 bulbes de Stachys ont crû et multiplié donnant chacun de 200 à 300 rhizomes chacun soit près de 5 kg ! Le 3 février 1885, Auguste fait lecture d’une note qu’il a faite sur Stachys affinis à la Société Nationale d’Acclimatation et distribue 1 l de rhizomes aux membres présents. Pendant l’hiver 1885-1886, le jardin de Crosne produit plusieurs centaines de kg de rhizomes !

Auguste et Désiré cherchent alors à faire connaître ce précieux légume et à le diffuser… Pour faciliter les échanges avec l’étranger, les deux filles d’Auguste qui savaient déjà l’anglais et l’allemand apprennent le russe…

Dès 1886, Stachys affinis Bunge apparaît ainsi dans le catalogue de Vilmorin et Andrieu. L’hiver 1886-1887 la production des jardins d’Auguste à Crosne atteint 3 tonnes soit environ 1.500.000 rhizomes !

Début février 1888, Auguste Pailleux fait lecture de la note suivante aux membres de la section végétaux de la Société Nationale d’Acclimatation :

« Messieurs (ndlr : il n’y avait donc apparemment pas de femmes dans l’assemblée :) !),

Si vous le permettez, je vous parlerais aujourd’hui encore du Stachys. Ce sera sans doute la dernière fois.

Vous le savez que pendant 3 ans, j’ai donné et offert à tout le monde, à Paris et hors de Paris, du plant de notre nouveau légume. Cependant, j’ai prévu au printemps dernier que cet hiver encore, il ne serait pas présenté au marché et qu’il ne serait cultivé que dans quelques jardins d’amateurs. Il n’était pas possible de prédire à quelle époque la plante serait adoptée par les cultivateurs et pourrait entrer dans la consommation générale.

Or je suis chargé d’années et pressé d’agir avant que l’âge m’interdise tout travail.

Je savais que le Cerfeuil bulbeux, introduit en 1726, dans l’Europe occidentale, n’était connu en France que depuis 50 ans à peine et qu’il était encore peu répandu aujourd’hui.

Si je consultais mes souvenirs, ils me diraient que, dans l’espace de cent ans, il n’avait été introduit chez nous, que deux nouveaux légumes : l’Igname de Chine, à peu près abandonné, et le Cerfeuil bulbeux que j’ai cité tout à l’heure.

Je désirais éviter au Stachys la longue incubation qu’ont subi les plantes antérieurement introduites. Je voulais tenter de réaliser en trois mois la propagation de l’excellent légume que notre Société a introduit, et qui selon moi, est destiné à occuper une large place dans la consommation générale.

J’ai pensé que je ne pourrais atteindre mon but qu’en me faisant planteur du Stachys, m’assurant ainsi d’une récolte qui n’est pas encore achevée et qui donnera environ 3.000 kg de tubercules.

Convaincu que les mots « Stachys » ne pouvaient pas être prononcés par nos cuisinières, j’ai donné aux tubercules le nom de Crosne, qui est celui de mon village.

J’ai fait imprimer trois mille cartes-prospectus qui font connaître le légume et qui m’ont été d’un grand secours. J’en ai distribué quelques unes aux membres présents à la séance du 4 janvier et j’en mets encore aujourd’hui à votre disposition.

Dès les derniers jours de novembre, j’ai fait la place, j’ai cherché des acheteurs, rebuté par le plus grand nombre, bien accueilli par quelques-uns.

En ce moment, j’ai à Paris dix acheteurs, dont la vente s’accroît chaque jour. J’expédie notre légume à Lille, Roubaix, Amiens, Reims, voire même Bruxelles. J’attends des demandes de quelques autres villes.

J’ai fait déguster nos tubercules par Brébant, le sympathique et renommé restaurateur que vous connaissez tous. Il a reconnu leur mérite, les a mis sur sa carte du jour, les a fait entrer dans la salade japonaise, ce mets à la mode dont la recette est plaisamment donnée dans Francillon et l’auteur (ndlr : Alexandre Dumas fils) connaît maintenant le Stachys.

MM. X… de Paris ont employé 100 kg de Stachys à la confection de leurs Pickles. Ils en expédient à une maison en province et m’écrivaient le 30 janvier : « hier, samedi, le messager nous a remis de votre part, une caisse de Stachys. Veuillez-nous en faire livrer de nouveau 30 kg, mardi prochain, 30 kg, samedi prochain. Dans le cas où votre récolte s’épuiserait, veuillez donc nous en réserver environ 100 kg. Ces Strachys sont tous expédiés en province et mangés comme légumes frais. Le succès nous paraît assuré, et nous croyons que l’année prochaine, vous pourrez en faire sans crainte.

‘’L’art culinaire’’ du 30 janvier dernier contient une petite note sur les Crosnes du Japon, avec figure très exacte du tubercule : ‘’sous le nom de Crosne du Japon’’, la Société Nationale d’Acclimatation vient d’introduire et veut propager ce nouveau légume. Nous ne pouvons qu’applaudir à cet essai.

Ne paraissant qu’en hiver, au moment où nos excellents produits français sont très rares, ce légume peut être d’une véritable utilité dans le service culinaire. Sa forme est très originale et gracieuse ; son goût rappelle celui de l’artichaut. La cuisson en est très facile et rapide ; son emploi est en réalité multiple’’.

Pour répandre de plus en plus l’usage de notre légume, je viens de m’entendre avec un jeune homme actif et intelligent qui poursuivra l’œuvre commencée.

Il est malheureusement douteux que ma récolte suffise aux demandes pour le mois de février. Je ne pouvais pas entreprendre à tout hasard une culture plus étendue.

Aussitôt que le Stachys paraîtra aux Halles, est-il besoin de vous dire que votre confrère disparaîtra comme vendeur et redeviendra purement et simplement le chercheur de plantes nouvelles auquel vous avez toujours accordé sympathies et remerciements ».

J’ai la satisfaction de constater que les achats se renouvellent sans cesse. Notre succès n’est pas un feu de paille : c’est un feu qui ne s’éteindra pas. »

Effectivement, en 1888, les récoltes des jardins d’Auguste ne suffiront pas à honorer les commandes parvenues à Auguste Paillieux : le succès du crosne est fulgurant en dépit des difficultés de nettoyage de ce tubercule biscornu ne pesant que 2 à 3 g par pièce et qui provoque des flatulences…

Les cultivateurs prennent le relais et la vente aux Halles débute en 1889. Dès cette année-là, un grand centre de culture de crosnes voit le jour à Schepdael en Belgique et sa production servira longtemps à fournir principalement les Halles de Paris.

La consommation se généralise alors rapidement et la demande étant fortement croissante ainsi que la production, le prix des crosnes baissent… En 1898, année de la mort de Auguste Paillieux, on le trouve ainsi à 0,15 francs les 500 g dans les voitures des marchands de quatre-saisons (ce qui représente selon l’INSEE environ 0,5 euros 2009) ; dans les quartiers chics où la demande est très forte, il monte parfois juqu’à 0,40 francs la livre (soit 2,5 euros le kilo)…

Les « cartes-prospectus » d’Auguste expliquent comment cultiver le crosne mais aussi comment le préparer et l’accomoder, en s’appuyant sur l’art culinaire de grands restaurateurs parisiens dont Paul Brébant, chef renommé qui dirigeait le Brébant-Vachette, restaurant très prisé et fréquenté par les écrivains Zola, Daudet, Flaubert, … et de grands financiers et industriels.

La note ci-dessus montre le succès dès 1887 de l’opération marketing d’Auguste Pailleux et établit clairement, contrairement à ce que colportent des tas de sites web, que ce n’est pas Alexandre Dumas fils qui a promu le crosne mais plutôt Paul Brébant qui a contribué au succès du légume en le substituant à la pomme de terre de la salade japonaise Francillon du dit écrivain. Et c’est ainsi apparemment Paul Brébant qui fît découvrir le crosne à Alexandre Dumas fils d’après ce qu’en dit Auguste Paillieux début 1888…

En 1889, Auguste Paillieux et Désiré Bois publient l’ouvrage « Crosne épiaire à chapelets : Histoire d’ un nouveau légume » qui décrit leur aventure autour du crosne à Crosne, menée de 1882 à 1888.

Et le crosne ne fait pas son bout de chemin qu’en France mais débarque aussi en Angleterre, en Allemagne, en Italie, en Russie, aux USA, … Dans son guide culinaire, Escoffier donne 7 manières de l’apprêter : beignets de crosnes, crosnes à la crème, croquettes de crosne, crosnes à la milanaise, crosnes sautés au beurre, crosne au velouté et purée de crosnes… et note de plus qu’on peut aussi le préparer en gratin, à la polonaise, etc.

Après avoir connu le succès du crosne, une des plus belles œuvres de sa vie, Auguste Pailleux s’éteindra en corrigeant les épreuves de la troisième édition du « Potager d’un curieux » qui paraîtra un an après sa mort.

Puis le crosne, après avoir connu la gloire jusqu’après la guerre 1939-1945, fût victime de virus, peu après la mort de Désiré Bois, et d’une baisse de productivité du fait de sa trop importante multiplication végétative à partir de quelques souches. Et, vers 1975, en France, la productivité devînt si faible pour une récolte consommatrice de main-d’œuvre que la culture du crosne finit par s’éteindre pratiquement presque complètement, en dehors de quelques potagers de particuliers…

Mais, dans les années 1980, l’école d’horticulture d’Angers met au point des techniques d’assainissement qui permettent d’obtenir des résultats spectaculaires : doublement du poids des rhizomes des crosnes et augmentation de leur nombre conduisant à un triplement des rendements…

Sur ces nouvelles bases, la culture du crosne en France est repartie doucement depuis la fin des années 1980 et il est aujourd’hui cultivé en Val de Loire, dans la région parisienne, en Bretagne, en Bourgogne et dans la Somme : de deux à trois hectares cultivés en 1975, plus de cent hectares ont été atteints en 2004 et le crosne commence ainsi à remontrer timidement le bout de son rhizome sur les marchés…

Mais, à ce jour, le développement des cultures a du mal à être suivie par la reprise économique de cette charmante bébête si bonne…

On commence à le trouver sous une forme prête à cuisiner évitant son fastidieux nettoyage. Cela permettra-t-il au crosne de redorer son blason dans les cuisines ?

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