Bovins : les catégories, les types et les races

Comme l’a fait remarquer Guy Bedos sur France Inter en 1995 :

« …on dit un steak de bœuf, une côte de bœuf, un roti de bœuf… Mais dès que le bestiau semble suspect, c’est la vache qui devient folle !»

Certes, on dit du lait de vache… Mais il est vrai que si votre crémier vous vendait du lait de bœuf ou de taureau, vous seriez certainement méfiants a priori !

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Une jolie vache déguisée en bœuf !
M’enfin, tout ça, n’empêche pas la viande de bœuf d’appartenir aux deux sexes ! Même que c’est en fait de la viande du « sexe bovin faible » qui se retrouve en proportion environ 3 fois sur 5 dans nos assiettes !

Les catégories de viande bovine

En France, depuis 1998 (grâce à Guy Bedos ?), on distingue désormais différentes « catégories » de viande bovine, selon le sexe et l’âge du bovin, cette indication de catégorie devant être portée à la connaissance du consommateur :
- les jeunes bovins, mâles de plus d’un an et de moins de deux ans,
- les génisses, femelles de plus d’un an et qui n’ont pas vêlé (en général le premier vêlage a lieu vers deux ans à deux ans et demi),
- les bœufs, mâles adultes castrés,
- les vaches, femelles ayant vêlé,
- les taureaux, mâles adultes non castrés.

Nota bene : il ne faut pas confondre ces nouvelles catégories selon l’âge et le sexe avec les première, deuxième et troisième catégories, utilisées auparavant pour qualifier la « noblesse » des différentes pièces de viande de bœuf.

En 2005, la production française de viande bovine comprenait ainsi :
- 8% de bœufs dont 70 % de races laitières et 30 % de races à viande (soit respectivement 5,6 et 2,4% du total) ;
- 13% de génisses dont 33% de races laitières et 66% de races à viande (soit respectivement 4,3 et 8,7% du total) ;
- 31% de jeunes bovins dont 25% de races laitières et 75% de races à viande (soit respectivement 7,7 et 23,3% du total) ;
- 48 % de vaches dont 45 % de races laitières et 55 % de races à viande (soit respectivement 21,6 et 26,4% du total).

Globalement, si on fait les comptes, on a donc en moyenne « 1 chance sur 40″ d’avoir du bœuf de race à viande dans notre assiette et par contre 1 chance sur 2 de manger de la vache, dont près de la moitié issue de races laitières ! …mais aussi 1 chance sur 2 de manger de la viande bovine issue de races à viande !

Les animaux mâles ou femelles de moins d’un an ne sont pas répertoriés comme viande bovine mais commercialisés sous le nom de veau : veaux de boucherie pour les animaux abattus autour de cinq à six mois et veaux broutards pour ceux abattus vers 9 à 12 mois.

Le type et la race
Le type précise si la viande provient d’un bovin appartenant à une race « à viande », « laitière » ou « mixte ». Les races bovines sont en effet officiellement répertoriées dans l’un de ces trois types.

    Les races à viande sont sélectionnées pour leur bonnes performances bouchères

Le lait des mères est prioritairement voire exclusivement utilisé pour la croissance de leur veau ; c’est pourquoi on qualifie également les races à viande de races allaitantes. En France intra et extra métropolitaine, ces races sont :
* l’Aubrac,
* l’Aurochs-reconstitué : il ne s’agit pas des aurochs qui peuplaient l’Europe et en particulier la France à l’époque de nos ancêtres pré-historiques, et que les peintres du dimanche de l’époque représentaient dans des grottes… car ces aurochs ont disparus depuis de nombreux siècles… mais, comme son nom l’indique, d’une tentative de reconstitution de l’espèce menée à partir de croisements de races anciennes telles que Aurochs de Heck d’Allemagne, Highland d’Ecosse, Raço di bioù corse et Toro de lidia espagnol ; en 2005, il en existait environ 100 à 200 individus qui sont désormais reproduits « en race pure » ; cette race reconstituée est maintenue mais son maintien est considéré comme critique…
* la Bazadaise,
* la Blanc Bleu,
* la Bleue de Bazougers,
* la Blonde d’Aquitaine,
* la Charolaise,
* la Combat,
* la Corse,
* la Créole Guadeloupe,
* la Gasconne,
* l’Hereford,
* l’INRA 95,
* la Limousine,
* la Mirandaise, race autochtone du Gers, considérée comme en danger mais maintenue et dont il existait en 2005 environ 1.200 individus,
* la Parthenaise,
* la Raço di bioù,
* la Rouge des prés,
plusieurs de ces races étant de diffusion locales… et sans oublier :
* la Betizu, race autochotone sauvage des pays basques français et espagnols, considérée comme en danger (en 2005 il en subsistait environ 60), protégée mais non maintenue car actuellement en voie de reconnaissance par le Ministère de l’Agriculture.

    Les races laitières sont sélectionnées pour leur aptitude à la production de lait

Leur production laitière est destinée en très grande partie à la consommation humaine que ce soit sous forme de lait, de produits lactés, de beurre ou de fromages. En France, ces races sont :
* la Jersiaise,
* la Prim’ Holstein,
dont non seulement les jeunes et les mâles mais même les vaches finissent néanmoins sur les étals des boucheries après leur carrière de vaches laitières, en tant que vaches de réforme… Comme quoi il vaut mieux être réformé du service national que de la traite des vaches…

mais aussi :
* la Rouge des Prés « Lait »,
* la Salers « Lait »,
races actuellement en voie de reconnaissance par le Ministère de l’Agriculture.

    les races mixtes sont sélectionnées à la fois pour leur aptitude à la production de lait et de viande

En France, ces races sont :
* l’Abondance,
* l’Armoricaine,
* la Béarnaise,
* la Bleue du Nord,
* la Bordelaise (race autochtone d’Aquitaine maintenue mais dont le maintien est considéré comme critique : il en existait en 2005 environ 40 spécimens…),
* la Brune,
* la Casta,
* la Créole Martinique,
* la Ferrandaise,
* la Froment du Léon,
* la Lourdaise,
* la Maraîchine,
* la Montbéliarde,
* la Nantaise,
* la Normande,
* la Pie Rouge des Plaines,
* la Rouge Flamande,
* la Salers,
* la Saosnoise,
* la Simmental Française,
* la Tarentaise,
* la Villard de Lans,
* la Vosgienne,
dont certaines n’ont une diffusion que très locale…

ainsi que :
* la Flamande Originelle,
* l’Hérens,
* la Marine Landaise (race maintenue mais dont le maintien est considéré comme critique et qui est en voie de reconnaissance1950, par le Ministère de l’Agriculture) ; cette race mi-sauvage à sauvage fût décimée pendant la seconde (ou deuxième ?) guerre mondiale et il n’en restait, à la fin de la guerre, que quelques individus redevenus sauvages dont les derniers s’éteignirent en 1963 aux environs de Biscarosse… Mais, en 1968, par miracle, un maquignon reconnût lors d’une foire que tout un troupeau que venait vendre un vieil homme avant de prendre sa retraite appartenait à cette race que l’on croyait disparue. Et c’est grâce à cela que cette race, la seule subsistante autochtone sauvage de France avec la Betizu, pût être maintenue ! Merci monsieur le maquignon ! Mais malgré tout, il n’en subsistait que 12 recensées officiellement en 2005… Autant dire que vous n’en trouverez pas tous les jours chez le boucher !
* la Bretonne Pie Noire ; depuis le XIXème siècle, cette race autochtone bretonne, de petite taille et se satisfaisant de pâturages pauvres, comptait au moins 500.000 individus ce qui la plaçait au rang des premières races bovines françaises. Mais, dès le début des années 1950, encouragés par la politique d’intensification de la production agricole française, de nombreux éleveurs bretons leur substituent des Frisonnes, plus grandes et par conséquent plus productives si on leur offre des pâturages plus riches ou qu’on les élève à l’étable, nourries de fourrages et de farines… De plus, les Frisonnes, de même robe noire et blanche que les Bretonnes Pie Noir, s’intègrent bien au paysage puisqu’elles arborent fièrement la couleur locale « gwenn ha du » :) ! Dès le début des années 1960, le cheptel Bretonne Pie Noir descend en dessous de 400.000 bêtes et, en 1974, au rythme où ça va, la Société d’ethnozootechnie annonce une extinction probable de la race dès 1980. Fin 1975, une petite cinquantaine d’éleveurs bretons détenteurs d’environ 300 bêtes sur les 15.000 restantes veulent éviter cet holocauste, établissent un plan pour sauver la race et déposent une demande de subvention au Conseil général de Bretagne pour les aider : leurs collègues éleveurs de Frisonnes et de Hollsteins les qualifient d’écolo-folklo-passéistes et réclament cet argent pour leurs propres usages… Mais, dès 1976, les défenseurs de la Bretonne Pie Noir arrivent à convaincre le ministère de l’agriculture de l’utilité de leur démarche et, leur programme de sauvegarde, le premier pour une race bovine en France, est engagé. Puis un programme de sauvegarde génétique est adopté en 2003 pour optimiser les accouplements afin de limiter la consanguinité tout en favorisant les gènes rares. Car, répertoriée comme race laitière en 2008 lors de la publication de ce post, notre brave petite bretonne a néanmoins une qualité de viande reconnue et, peu après, dès que sa descendance a été considérée comme assurée, elle a été promue dans les races mixtes. Mais avec un effectif de l’ordre de 2.000 à 3.500 estimé en 2016, son lait et sa viande, de qualités reconnues, restent rares. (voir Union Bretonne Pie Noir et Wikipédia Bretonne Pie Noir

Globalement la moyenne de consommation de viande de gros bovins en France par personne est actuellement d’un petit peu plus de 100 g de viande par semaine, ce qui, en terme de consommation, met cette viande en 2ème position après la viande de volailles… En 2005, cette viande était vendue pour environ 20% par les petits bouchers, sur les marchés ou par vente directe et pour le reste par la grande distribution.

Pour répondre à ce marché, il y a en France actuellement environ 19 millions de bovins appartenant à la cinquantaine de « races » citées ci-dessus, ce qui constitue un des cheptels parmi les plus nombreux et les plus diversifiés au monde. Pour finir sur cette évocation des races bovines françaises, on aura une pensée émue pour les Alderney, race proche des Guernesey, dont le cheptel, victime expiatoire du débarquement des Alliés en Normandie, fût décimé en 1944 par les occupants allemands d’Alderney lorsque ceux-ci abandonnèrent leur position sur l’île…

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5 réponses à “Bovins : les catégories, les types et les races”

  1. Très bon article

  2. La Bretonne Pie Noir est une race mixte et pas seulement laitière :-)

  3. Exact aujourd’hui Delair ! mais à l’époque où j’ai écrit l’article, en novembre 2008, la race Bretonne pie noire n’avait pas le droit à la « mixité » :o ) et n’était que laitière ! Probablement pour préserver la race qui était encore considérée comme menacée !

    Voir la page Becedia :

    « La BPN, à l’origine uniquement laitière-beurrière, est aujourd’hui agréée par le ministère comme race mixte. Pratiquement, les effectifs se répartissent également entre les deux systèmes. D’une façon générale, les éleveurs « professionnels » sont des producteurs en transformation fermière, valorisée en circuit court (magasin à la ferme, marché, AMAP, magasin bio, restaurateurs). La palette des produits laitiers est large : du lait cru à la tomme en passant par le beurre, la crème, le lait ribot, les fromages frais ou affinés, les yaourts et le fameux « Gwell » un lait fermenté, agréablement acidulé, rappelant les laits caillés de notre enfance. »

  4. Luc Bernard le 5 février 2024 à 15:13

    Bonjour. Merci de corriger le fait que La Bretonne Pie Noir n’est pas une race laitière mais une race mixte. Cordialement, Luc Bernard

  5. Bonjour Luc et merci pour la remarque !

    Effectivement, depuis l’écriture de mon poste bovin il y a 16 ans, la Bretonne Pie Noir est passée de laitière à allaitante et est donc aujourd’hui une race mixte ! Néanmoins, son effectif réduit (de l’ordre de 1/10.000ème du cheptel bovin français) en font une espèce très rare ! Voir Union Bretonne Pie Noir

    J’ai modifié et complété le post pour préciser le contexte de ce changement de statut !

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